Détection des anomalies cardiaques assistée par IA

Des chercheurs et chercheuses de l'Inselspital, l'Hôpital universitaire de Berne et de l'Université de Berne ont développé un outil basé sur l'IA qui détecte et classifie avec une grande précision les anomalies des artères coronaires sur les images de scanner. Cela pourrait améliorer considérablement le diagnostic et le traitement de cette maladie cardiaque rare. L'étude montre les applications concrètes de l'IA dans la pratique clinique et souligne l'étroite collaboration dans le domaine de la médecine numérique entre l'Université de Berne et le Inselspital.

Les anomalies coronariennes, en anglais Anomalous Aortic Origin of a Coronary Artery (AAOCA), sont des malformations cardiaques congénitales très rares qui passent souvent inaperçues à l'œil inexpérimenté, mais qui peuvent avoir de graves conséquences pour la santé. En particulier chez les personnes jeunes et physiquement actives, elles peuvent entraîner une mort cardiaque subite ou une crise cardiaque. Selon les rapports d'autopsie, jusqu'à 30 % des décès inattendus de jeunes athlètes sont dus à des artères coronaires mal orientées. Comme elles sont très rares et que l'on ne sait souvent pas s'il s'agit d’une anomalie bénigne ou potentiellement à risque, leur identification et leur classification constituent un défi. Un meilleur diagnostic, permettant de détecter ces anomalies de manière entièrement automatique, pourrait sauver des vies de patients et de patientes.

Une équipe de recherche dirigée par Christoph Gräni, professeur extraordinaire à l'Université de Berne et directeur de l'imagerie cardiaque à la clinique universitaire de cardiologie de l’Inselspital à Berne, et le Dr Isaac Shiri, directeur de recherche en intelligence artificielle (IA) en médecine cardiovasculaire à l’Inselspital, a développé en collaboration avec l'Hôpital universitaire de Zurich un outil innovant et entièrement automatisé basé sur l’IA. Celui-ci détecte et classifie de telles anomalies dans les images dites de scanner cardiaque. L'étude a été publiée récemment dans la revue Nature Communications.

Un centre bernois de premier plan pour les anomalies coronariennes

« En tant que l'un des principaux centres d'évaluation des anomalies coronariennes, notre clinique universitaire de cardiologie accueille des patients et patientes du monde entier. Nous disposions donc d'une grande quantité de données d'images CT cardiaques que nous avons pu utiliser pour l'entraînement de l'algorithme », explique Christoph Gräni, dernier auteur de l'étude. Au total, 4'128 images CCTA de 2'376 patients et patientes ont été analysées, dont 335 personnes sont concernées par une AAOCA. L'outil développé utilise un algorithme de deep learning en deux étapes pour la segmentation et la classification. La première étape, la segmentation de l'image, sépare les structures anatomiques pertinentes des tissus environnants afin de fournir une vue claire des artères coronaires. Après la segmentation de l'image, l'étape de classification se concentre sur la détection des cas d'AAOCA et sur la détermination de l'endroit d'où part l'artère coronaire anormale de l'aorte et de son tracé. Le modèle a été validé avec des jeux de données externes en collaboration avec l'hôpital universitaire de Zurich et a également été testé sur un jeu de données accessible au public afin de garantir la solidité et la fiabilité des résultats.

Haute précision de l'algorithme

« L'algorithme basé sur l'IA détecte les malformations cardiaques directement dans les images et détermine automatiquement le type d'anomalie. Le modèle a fait preuve d'une précision étonnamment élevée et a même pu identifier des cas limites pour lesquels même les experts et expertes n'étaient pas d'accord. Cette grande précision souligne le potentiel de l'outil de s’intégrer parfaitement dans les processus de travail cliniques », explique Gräni. Par exemple, l'outil pourrait fournir des alertes en temps réel pour les anomalies potentiellement à haut risque et aider les spécialistes de l'imagerie à établir un diagnostic clinique. En outre, l'outil permet de rechercher de manière ciblée des anomalies coronariennes dans de grands ensembles de données d'imagerie basés sur la population et d'analyser leur relation avec le résultat clinique. « L’analyse de maladies aussi rares est manuellement trop compliquée dans de grandes cohortes rétrospectives et prospectives d'images. Mais ce sont précisément des études de ce type qui sont absolument essentielles pour améliorer la stratification des risques », souligne Gräni.

Une étroite collaboration dans le domaine de la médecine numérique

Le présent travail montre de manière exemplaire l'impact directe que peut avoir la médecine numérique pour améliorer la prise en charge des patients et patientes, et l'importance de l'étroite collaboration entre l'Université de Berne et le Inselspital dans le développement d'applications d'IA en médecine. Faire progresser la numérisation en médecine est un objectif stratégique à long terme de la Faculté de médecine de l'Université de Berne et est étroitement coordonné avec la stratégie de numérisation supérieure de l'Université de Berne.

D'autres études sont nécessaires pour affiner le modèle et le tester dans des environnements cliniques réels. L'équipe de Gräni développe maintenant un jumeau artificiel numérique pour les anomalies coronariennes en collaboration avec Dominik Obrist, professeur en ingénierie cardiovasculaire du groupe de recherche Cardiovascular Engineering au ARTORG Center for Biomedical Engineering Research de l’Université de Berne. Pour cela, il est nécessaire de disposer de données importantes issues de mesures interventionnelles, qui sont collectées en collaboration avec Lorenz Räber, directeur du laboratoire de cathétérisme cardiaque de l’Inselspital. Cette approche devrait permettre d'évaluer la pertinence d'une anomalie coronaire à l'aide d'un jumeau numérique et physique en dehors du patient - par exemple dans des conditions sportives simulées - afin d'éviter les examens interventionnels et de mieux évaluer le risque. « Cette technologie du jumeau numérique pourrait être étendue à d'autres anomalies cardio-vasculaires rares et transformer le diagnostic cardiologique dans son ensemble », conclut Gräni.

Informations sur la publication :

Shiri, I., Baj, G., Mohammadi Kazaj, P. et al. (2025) AI-based detection and classification of anomalous aortic origin of coronary arteries using coronary CT angiography images. Nat Commun 16, 3095 (2025).
URL : https://www.nature.com/articles/s41467-025-58362-9
DOI : 10.1038/s41467-025-58362-9

Plus d'informations (en anglais)

University Clinic for Cardiology

Digital Medicine Strategy of the Faculty of Medicine

AAOCA

03.04.2025